
XIXème siècle
Emma Lajeunesse (1847-1930)
Rédaction : Louise Chevrier de Société d’histoire de la seigneurie de Chambly
Le 26 mars 1883, Emma Lajeunesse, dite l’Albani, est à bord d’un train en provenance de New York à destination de Montréal, accompagnée de son mari, Ernest Gye, directeur du célèbre Covent Garden à Londres. Après 20 années d’absence, la diva revient au pays. Montréal vibre d’une joie intense : à la gare Bonaventure se presse une foule de 10 à 15 000 personnes; 300 raquetteurs, flambeaux à la main, forment un cortège à l’enfant la diva. Au cours de la réception à l’Hôtel de Ville, le poète Louis Fréchette récite une ode composée à la gloire du « rossignol canadien ».
Les Bas-Canadiens ont suivi pas à pas sa carrière. La petite fille de Chambly brille sur toutes les scènes européennes de l’art lyrique. Les journaux rapportent fidèlement les ovations, les bouquets et les diadèmes offerts par ses admirateurs et têtes couronnées. La reine Victoria lui a offert une croix en perles en témoignage d’amitié.
Née en 1847, dès l’âge de 4 ans, Emma étudie le piano avec sa mère, Mélina Mignault. Son père, Joseph Lajeunesse, prend la suite, il sera son seul professeur jusqu’à l’âge de 20 ans. Au couvent du Sacré-Cœur de Sault-au-Récollet, Emma complète son éducation. La jeune fille est déjà une musicienne accomplie : elle maîtrise le piano et la harpe, elle compose des oratorios. Sa sœur, Cordélia, est tout aussi douée. Mais la voix d’Emma est exceptionnelle. Joseph Lajeunesse multiplie les récitals de ses filles afin de réunir des fonds suffisants pour envoyer Emma étudier en Europe. La famille s’exile à Albany où elle réussira enfin à réunir suffisamment d’argent.
En 1868, Emma est à Paris, puis en Italie, auprès du professeur Lamperti. Elle fera ses débuts en 1872 à Messine avec le rôle d’Amina dans La Sonnambula. Une longue et exceptionnelle carrière s’amorce. On vante sa voix de soprano, pure et cristalline, son charisme et son bon cœur. « Son répertoire de 35 rôles, considérable pour l’époque, a comme particularité sa diversité stylistique », rapporte son biographe Pierre Vachon qui voit en Emma Lajeunesse une figure d’avant-garde. Elle a ouvert le chemin à plusieurs compatriotes, elle a apporté ses encouragements à de nombreux musiciens canadiens. Emma Lajeunesse est décédée en 1930 à Londres. Emma Lajeunesse Albani est désignée « personnage historique national du Canada » et « personnage historique » au Répertoire du patrimoine culturel du Québec.
Publication le 24 août 2023.

Références :
- L’Événement, 27 mars 1883
- La Minerve, 27 et 29 mars 1883.
- « Une fleur de l’art vocal, L’Albani », Les cahiers de la seigneurie de Chambly, no 34, 2010.
Sally E. Wood (1857-1928)
Rédaction :
Sally Elizabeth Wood (1857-1928) est une photographe professionnelle qui possède son propre studio de photographie dans la région de Knowlton, entre 1897 et 1907. Elle aurait été formée par le célèbre William Notman de Montréal, avant de s’établir dans sa région natale et de travailler pour le photographe John A. Wheeler. Celui-ci prend sa retraite quelques années plus tard, et Sally ouvre son propre studio à ce moment.
Photographiant autant des portraits d’individus et de familles, que des scènes de la vie quotidienne, ou des paysages des Cantons de l’Est, Sally se démarque par sa polyvalence, mais surtout par sa grande sensibilité. Sa manière exceptionnelle de nous présenter le sujet de la photo, est comme une invitation à nous faire dépasser notre rôle de spectateur pour entrer aussi dans ce décor. En 1905, la maison d’édition écossaise Valentine’s & Sons publie une série de ses photographies de paysages en cartes postales.
L’an dernier, le Musée Lac-Brome Museum a réalisé une exposition posthume de Sally E. Wood et John A. Wheeler, et a publié un magnifique catalogue de cette exposition, qui est devenue virtuelle sur le site web du musée. Le musée possède également le fonds d’archives de Sally E. Wood, dont quelques photographies sont accessibles à la consultation sur le site web des archives des Cantons de l’Est, à cette adresse : https://www.townshipsarchives.ca/sally-e-wood-fonds
Sally E. Wood prouve qu’en tant que femme, elle est assez forte pour transporter elle-même son matériel, lourdement chargée, d’un endroit à l’autre, pour effectuer ses prises de vues en extérieurs. Comme l’explique Jeremy Reeves, dans Wood & Wheeler : « elle utilise le portrait en photographie comme un moyen pour explorer le monde et, par le fait même, échapper à l’univers clos dans lequel les femmes étaient enfermées » (p.190).

Publication le 18 août 2022.

Références :
- Jeremy Reeves et Abbey Lacroix, Wood & Wheeler, Knowlton, Brome County Historical Society, 2021.
- Luce Vallières, « Sally E. Wood (1857-1928): les photographes femmes au tournant du 20e siècle au Québec », Rendez-vous d’histoire de Québec, conférence prononcée le 12 août 2022
Béatrice La Palme (1878-1921)
Rédaction : Louise Langevin, Société d’histoire et de généalogie de Belœil-Mont-Saint-Hilaire
Ses dons de chanteuse et d’actrice, sa personnalité et l’étendue de sa voix en ont fait une artiste très en demande tant au Québec qu’à l’international. Née à Belœil, violoniste et soprano puis professeure de chant, elle ne nous a laissé hélas aucun enregistrement de sa voix.
La famille Lapalme-Letestu possède une terre à Belœil depuis 1770, mais cultive également le chant et la musique grâce à la mère. En 1881, elle s’établit à Montréal. Là, Béatrice découvre un violon oublié à la maison par un oncle et se passionne pour cet instrument. Deux tantes, musiciennes au pensionnat d’Hochelaga, lui donnent des leçons et d’éminents professeurs prendront la relève.
Gagnante du prix Strathcona décerné par l’université McGill en 1895, elle s’envole au Royal College of Music de Londres où son professeur de chant découvre ses capacités vocales. À 18 ans, elle se produit avec Emma Albani devant la reine Victoria. En 1903, elle débute à Covent Garden et, deux ans plus tard, elle joint le Théâtre national de l’Opéra comique à Paris pour quatre années. En 1908, elle épouse Salvator Issaurel, chanteur lyrique rencontré à l’Opéra de Lyon. Le couple s’installe en 1911 à Montréal où la cantatrice triomphe au His Majesty’s et au Monument national.
Béatrice atteint le sommet de sa gloire à partir de 1910 dans des opéras célèbres et signe La Palme en deux mots. Ses récitals s’enchaînent lors de tournées en Amérique du Nord et elle s’établit à New York en 1913. Hélas, ses problèmes d’ouïe s’aggravant, elle présente un concert d’adieu à Montréal en 1919. À la suite d’une intervention chirurgicale ratée, elle décède à 43 ans en 1921. Une rue de Boucherville a été nommée en son honneur.
Publication le 1er août 2024.

Références :
- Marie-Thérèse Lefebvre, « LA PALME, BÉATRICE (Issaurel) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 13 juin 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/la_palme_beatrice_15F.html.
- Pierre Lambert, « Béatrice Lapalme, la diva de Belœil », Cahier d’histoire, Société d’histoire et de généalogie de Belœil–Mont-Saint-Hilaire, no 100, février 2013, p. 87-90.
- Pierre Lambert, « Béatrice La Palme, une diva native de Belœil ». Le Passeur, avril 2021, vol. XXXVIII, no 4, p. 3.
- « Béatrice La Palme », [En ligne], Wikipédia, 12 avril 2021, 23 h 22.
[https://fr.wikipedia.org/wiki/Béatrice_La_Palme] (Consulté le 13 juin 2024).
Antonia Nantel (1886-1955)
Rédaction :
Petite fille d’Adélaïde Desjardins, Antonia Nantel nait en 1886 à Saint-Jérôme. Débutant l’étude de la musique, du chant et de l’art dramatique à un jeune âge, elle baigne dans le milieu artistique autant durant son enfance au Québec que durant son adolescence passée en Europe. Quelques années après son retour au pays, elle épouse Louis-Athanase David avec qui elle a cinq enfants.
Ayant participé à la création du premier orchestre professionnel du Québec, le Montreal Orchestra, en 1930, qu’elle quitte à la suite d’un conflit, elle fonde, en 1934, avec son mari et Wilfrid Pelletier, la Société des concerts symphoniques de Montréal, aujourd’hui l’Orchestre symphonique de Montréal – OSM. L’organisme répond ainsi au besoin de donner une place aux chefs et aux solistes francophones, qui sont sous-représentés. Antonia Nantel ne ménage pas les efforts pour faire rayonner les activités de la Société, prenant en charge l’organisation et le déroulement des événements, tels que les Matinées symphoniques, dont le but est de démocratiser la musique classique auprès du grand public et surtout auprès des enfants. Le succès est au rendez-vous et Antonia Nantel poursuit son travail. Toujours avec son mari, elle fonde, au milieu des années 1930, les Festivals de Montréal, offrant une programmation allant du chant lyrique à l’opéra en passant par les récitals et les concerts de musique de chambre.
Antonia Nantel s’implique également auprès des mères dans le besoin par le biais de l’Assistance maternelle.
Jusqu’à son décès, en 1955, elle contribue au rayonnement de la culture canadienne-française. Son dévouement et son engagement en inspirent plusieurs et à tracé la voie aux générations futures de femmes. Parmi celles-ci, notons ses petites-filles, Françoise et Hélène David, qui se sont illustrées au niveau de la politique québécoise.
Publication le 31 août 2023.

Références :
- S.n. – Antonia Nantel (1886-1955). Orchestre symphonique de Montréal, 2023. (URL : https://www.osm.ca/fr/antonia-nantel/)
- Québec (Province). Culture et communications. – Nantel, Antonia. Répertoire du patrimoine culturel du Québec, 2013. (URL : https://www.patrimoine-culturel.gouv.qc.ca/rpcq/detail.do…)
Germaine Malépart (1898-1963)
Rédaction :
Germaine Malépart nait le 7 juillet 1898 à St-Vincent-de-Paul. Elle est la fille d’Odilon Malépart et Adouala Gadbois. Elle est l’ainée de 10 enfants dont 7 décèderont en très bas âge.
Germaine étudie déjà à 7 ans le piano avec le grand pianiste Arthur Letondal. À 19 ans elle remporte le prestigieux concourt Prix d’Europe suivi par l’obtention de deux bourse du Ladies’ Morning Musical Club. Cela lui permettra d’étudier à Paris avec Isidor Philipp et Maurice Amour durant cinq années. Elle donnera alors des récitals à Paris aux salles Gaveau et Pleyel.
De retour à Montréal en 1922, elle donne au Ritz-Carlton un concert qui marque ses débuts professionnels. Ses concerts obtiennent les meilleures critiques. Elle se produira dans plusieurs grandes villes des États-Unis et du Canada. Vers 1940, elle délaisse progressivement les concerts pour se consacrer à l’enseignement au Conservatoire de musique du Québec et à l’École supérieure de musique d’Outremont qui deviendra l’École Vincent-d’Indy. Elle aura comme étudiant les plus grands tels Lise Boucher (Prix d’Europe 1958), André Gagnon, Mireille Lagacé, Renée Morisset, Claude Savard, Pierre Hétu etc. Elle y consacrera toute sa vie influençant la formation de nombreux musiciens et marquera la vie musicale montréalaise. Elle décèdera le 19 avril 1963 à 65 ans. Une salle du conservatoire porte son nom rappelant son apport exceptionnel.
Publication le 18 août 2022.

Références :
- Hélène Paul, Ces femmes qui ont bâti Montréal, Éditions du Remue-ménage, 1992, p. 163-165
- Louiselle Saint-Laurent, Mes racines, page sur Odilon Malépart
- Andrée Desautels, Mes racines, page sur Germaine Malépart
XXème siècle
Gaby Bernier (1901-1976)
Rédaction : Louise Chevrier de la Société d’histoire de la seigneurie de Chambly
Née à Chambly le 12 juin 1901, Gabrielle Fabiola est la fille de Séneville Bernier et Elzéar Bernier. Elle passe son enfance à Chambly en compagnie de son frère Donio et de sa sœur Éva avec qui elle étudie au couvent de la Congrégation Notre-Dame. Une tragédie survient en 1909. Le père, employé de la Montreal Light Heat & Power, est victime d’un accident de travail. La mère déménage alors sa famille à Montréal. Les demoiselles Bernier termineront leurs études au Pensionnat Sainte-Catherine.
Excellente pianiste, au point de songer à enseigner, Gaby est avant tout passionnée de mode et fait ses débuts comme première couturière chez Madame de Pompadour. En 1927, elle inaugure le Salon Gaby Bernier, rue Sherbrooke Ouest, près de l’actuel Ritz Carlton. L’immeuble sera démoli en 1937 pour faire place au magasin Holt Renfrew. Gaby s’installera rue Drummond jusqu’à sa retraite en 1960.
Les créations originales de Gaby Bernier comme le pantailleur ont habillé les dames de l’élite montréalaise, tandis que sa relation amoureuse avec le célèbre joueur de hockey Pit Lépine défrayait la chronique. Décédée en 1976, Gaby est inhumée dans le cimetière de Chambly.
De nos jours, un programme de mode se donne au pavillon Gaby-Bernier du Collège Marie-Victorin. En 2012, la romancière Pauline Gill consacre une trilogie romanesque à notre « Coco Chanel québécoise ».
Publication le 15 août 2024.

Marie-Ange Leduc (1901-1992)
Rédaction :
Marie-Ange Leduc, fille de Florentine Vinet (1871-1915) et de Louis-Oscar Leduc (1867-1908), naît à Beauharnois en 1901. Elle est l’avant-dernière d’une fratrie de six enfants. Fait exceptionnel pour l’époque et qui dénote une certaine aisance chez les Leduc – le père était marchand de charbon-, garçons et filles ont accès à l’éducation. Marie-Ange Leduc et ses sœurs fréquentent le couvent des Sœurs des Saints Noms de Jésus et de Marie de Beauharnois.
Orpheline à l’âge de quatorze ans, Marie-Ange poursuit ses études jusqu’à la dixième année. Elle s’installe ensuite à Montréal chez sa sœur aînée, Anita Leduc. Marie-Ange, qui sait lire et écrire, se voit offrir un poste de travail de bureau à la pharmacie Leduc situé au carré Chaboillez, à l’angle Notre-Dame et de l’Inspecteur. Le Dr Leduc engage également Louis Bergeron, comme commis pharmacien.
Les femmes se sont emparées de l’appareil photo à partir de son invention en 1839. Dans sa vingtaine, Marie-Ange Leduc s’empare de ce nouveau médium et en fait un de ses modes d’expression. Elle dirige son objectif, possiblement un modèle Brownie de Kodak, sur les enfants, leurs jeux, les rues, immortalisant en toile de fond le quartier Laurier Est. Des photos amateur qu’elle a soigneusement gardées et qui permettent de documenter l’époque. Par ces deux gestes, l’un artistique, l’autre un souci de conservation, nous pouvons, grâce à elle, nous tenir à ses côtés, témoin du regard qu’elle a porté sur le quotidien de ce quartier de Montréal en pleine émergence.
Après son mariage avec Louis Bergeron en 1925, Marie-Ange Leduc donne naissance à huit enfants, des grossesses qui s’étalent sur deux décennies. La vie de famille ne lui laissera plus beaucoup de répits par la suite. Elle conservera cependant ses trésors dans une valise qui a traversé le siècle jusqu’à nous. Elle s’éteint en 1992 mais le regard qu’elle a porté sur le monde qui l’entourait reste vivant.
Retrouvez sur le blogue de la Société d’histoire du Plateau-Mont-royal les douze Scènes de rue centenaires qui présentent des photos prises par Marie-Ange Leduc entre 1920 et 1931 :
https://blogue.histoireplateau.org/2022/10/04/les-leduc-dans-laurier-est-1920-1931/
Publication le 10 août 2023.


Gabrielle Messier (1904-2003)
Rédaction : Louise Langevin, de la Société d’histoire et de généalogie de Belœil—Mont-Saint-Hilaire
Née à Mont-Saint-Hilaire dans une famille de huit enfants, Gabrielle se passionne très tôt pour le dessin et la peinture. Grâce à sa formation artistique qui ne débute qu’en 1924, elle développe le plaisir de travailler avec les couleurs et les textures. Auprès d’Ozias Leduc, en 1940, elle acquiert une culture artistique, l’art de la composition et celui de la perspective. Puis, Leduc lui demande d’exécuter son portrait et reconnaît ainsi le talent de Gabrielle dont il fait son assistante dans la décoration de l’église Notre-Dame-de-la-Présentation à Shawinigan. Après le décès du maître en 1955, c’est Gabrielle qui termine l’œuvre.
Revenue de Paris en 1957, Gabrielle Messier crée son atelier d’art à Mont-Saint-Hilaire où elle accueille des groupes d’enfants et des adultes. Elle peint quelques portraits, plusieurs natures mortes et surtout des paysages habités, et elle collabore au film Correlieu tourné en 1957 dans l’atelier d’Ozias Leduc dont elle est chargée de compiler les archives. Ses œuvres sont exposées dans plusieurs galeries et, en 1979, une de ses œuvres, «La maison natale du peintre Ozias Leduc», entre au Musée du Québec. En 1984, son apport est largement souligné dans le documentaire Ozias Leduc, peintre-décorateur d’églises, réalisé par l’ONF.
Gabrielle quitte Mont-Saint-Hilaire en 1987 et termine sa vie, presque centenaire, en 2003 à Caplan dans la Baie-des-Chaleurs où elle peint surtout des marines. Ses œuvres – plus de 675– sont dispersées auprès de collectionneurs privés et logent dans quelques musées, dont ceux de Joliette, de Bonaventure (acadien), des Beaux-arts de Québec. En 1994, le Musée des Beaux-Arts de Mont-Saint-Hilaire organise une deuxième exposition regroupant 80 tableaux et dessins de l’artiste.
Décrite comme une femme sensible, généreuse et optimiste, elle laisse une œuvre descriptive et suggestive, inspirée par la nature. Voilà une artiste remarquable, une pédagogue des arts et une femme de cœur à inscrire dans l’histoire.
Publication le 3 août 2023.

Références :
- Robert Messier, « Gabrielle Messier ou l’art de toute une vie », Cahier d’histoire, Société d’histoire et de généalogie de Belœil–Mont-Saint-Hilaire, 1997, no 52, p. 27-42.
- Bibliothèques et archives nationales du Québec. Notice sur le fonds Gabrielle Messier. En ligne [https://advitam.banq.qc.ca/notice/676786].
Marian Dale Scott (1906-1993)
Rédaction :
Née à Montréal en 1906, Marian Dale Scott montre rapidement un grand intérêt pour la peinture. Dès l’âge de onze ans, elle suit des cours de peinture auprès de William Brymner, peintre réputé de l’Art Association of Montreal (connue aujourd’hui sous le nom de Musée des beaux-arts de Montréal) et ensuite à l’École des beaux-arts de Montréal. Elle étudie également à la Slade School of fine art de Londres. Elle juge néanmoins l’enseignement inintéressant et conservateur, étant donné qu’il suit la tradition académique, ensemble de principes rigoureux prônant entre autres la hiérarchie des genres artistiques et l’étude du nu. La pratique de Marian Dale Scott est au contraire influencée par les courants modernistes, notamment par le cubisme, mais également par les œuvres du Groupe des sept, association artistique célèbre au Canada. Dans cet ordre d’idées, elle cofonde avec l’artiste John Lyman, la Société d’art contemporain de Montréal, qui valorise l’art non académique montréalais. En 1927, elle épouse Frank R. Scott, poète et homme politique avec qui elle fréquente les milieux intellectuels anglo-montréalais.
Dans ses œuvres, Marian Dale Scott emploie une grande variété de style et de techniques picturales. Par exemple, au début de sa carrière, elle explore plusieurs sujets, allant des interactions humaines, à la botanique, en passant par le paysage et les scènes urbaines et semi-industrielles. En 1942, elle réalise une murale pour la Faculté de médecine de l’Université McGill, ce qui l’amène à s’intéresser davantage au monde microscopique et cellulaire en peinture. Durant les années 1960, son style est de plus en plus abstrait étant donné qu’elle expérimente l’art gestuel, avant de revenir à la représentation géométrique et linéaire dans les années 1970. En 1973, elle est nommée à l’Académie royale des arts du Canada. Au total, la carrière de Marian Dale Scott s’est étendue sur plus de 70 ans, puisqu’elle n’arrête de peindre que quelques mois avant son décès en 1993. Son œuvre, de plus en plus étudiée, est particulièrement emblématique de l’évolution de l’art moderne au Québec.
Publication le 25 août 2022.

Références :
- Monique Brunet-Weinmann, « Marian Dale Scott : phare de la modernité. Entretien. » Vie des Arts, 44 (179), 1981, pp.51.
- Esther Trépanier, Marian Dale Scott : Pionnière de l’art moderne, Ville de Québec, Musée du Québec, 2000, 300 p.

Françoise Loranger (1913-1995)
Rédaction : Louise Langevin, Société d’histoire et de généalogie de Belœil—Mont-Saint-Hilaire
L’œuvre de cette femme passionnée a marqué bien des générations. On se souvient de la série « Sous le signe du lion » diffusée à Radio-Canada en 1961 et en 1997. Les thèmes chers à Loranger s’y trouvent : la famille bourgeoise avec ses secrets, les classes sociales, l’adultère et l’euthanasie, le nationalisme, le catholicisme omniprésent. Si la série a bousculé des bien-pensants à l’époque, elle en a ravi plusieurs et demeure célèbre.
Françoise Loranger naît en 1913 à Saint-Hilaire dans une famille de la grande bourgeoisie qui lui lègue une soif pour la culture et la liberté d’esprit qui imprégnera tous ses écrits. Diplômée en lettres et en sciences, à 17 ans, elle publie des nouvelles dans des revues aussi diverses que la « Revue populaire », le « Bulletin des agriculteurs » ou le « Quartier latin ». Son style élégant et précis attire l’intérêt des lecteurs. Vers 1939, elle écrit des scénario pour la radio. « Mathieu » (1949) devient un roman classique où elle explore la quête de soi et le désir de dépasser sa condition hors de l’Église.
Dès 1960, ses pièces sont jouées sur scène et au petit écran, la confirmant grande dramaturge de la famille et des questions féministes et politiques : Une maison, un jour (1965), Encore cinq minutes (1967, Prix du Gouverneur général en 1968), Double jeu (1969), Jour après jour, Un si bel automne (1971). S’éloignant du théâtre traditionnel, elle écrit Le chemin du Roy (1967) et Médium saignant (1970).
Mariée deux fois, mère de deux filles, elle vit ses vingt dernières années loin de l’effervescence littéraire, à Saint-Marc en bordure du Richelieu, jusqu’à son décès en 1995, à presque 82 ans. Des rues, une bibliothèque, un cercle littéraire ont adopté son nom, soulignant ainsi son importance dans la littérature québécoise.
Publication le 17 octobre 2024.

Références :
- « Françoise Loranger », [En ligne], Wikipédia, 6 avril 2023, 12 h 03, [https://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7oise_Loranger] (Consulté le 4 octobre 2024)
- « Archives | Françoise Loranger, romancière et dramaturge résolument moderne, s’éteignait il y a 25 ans », [En ligne], Radio-Canada, 7 avril 2020, 13 h 16, (Consulté le 4 octobre 2024)
- Bibliothèque et Archives nationales du Québec, Notice du Fonds Françoise Loranger 1947-1993, Advitam, [https://advitam.banq.qc.ca/notice/526197], (Consulté le 4 octobre 2024)
- Leonard E. Doucette, « Loranger, Françoise », [En ligne], L’Encyclopédie canadienne, 2013, [https://www.thecanadianencyclopedia.ca/…/loranger…]
- Jean-Pierre Crête, Françoise Loranger : la recherche d’une identité, Montréal, Léméac, 1974, 148 p. (collection Documents)
- Denise Daigle et Marthe Goulet, Cahier généalogique. De Pierre Rivard à Françoise Loranger, Cercle littéraire Françoise Loranger, 2013, 48 p.
Mia Riddez (1914-1995)
Rédaction :
Née à Lyon, le 28 février 1914, Mia Riddez provient d’une famille d’artistes. Immigrant avec sa famille au Québec en 1920, Mia s’initie très jeune à l’art dramatique. Sa formation la mène de Montréal à Paris, où elle fait l’école de cinéma et apparait dans quelques films français. Elle poursuit sa carrière à New York, puis revient jouer dans les théâtres de Montréal, dans le milieu des années 1930.
En 1938, elle épouse Louis Morisset, journaliste à CKAC et écrivain dramatique. Les radioromans étant alors très populaires, elle laisse les planches pour jouer à la radio. On la retrouve dans des émissions telles que « La pension Velder » et « Les belles histoires des pays d’en haut ». C’est aussi à cette époque que Mia débute l’écriture avec son mari. Cette collaboration demeure cependant secrète jusqu’à la mort de Louis en 1968.
Au milieu des années 1950, elle devient la première femme à accéder au poste de présidente de l’Union des artistes, organisme visant à protéger les artistes ainsi que leurs droits. Elle démocratise le rôle de l’UDA et fait des artistes un enjeu politique.
Après le décès de son mari, elle abandonne sa carrière de comédienne pour se concentrer à l’écriture de téléromans. Elle poursuit celle de « Rue des Pignons », amorcée en 1966 et ce, jusqu’en 1977. Elle est également l’auteure des téléromans « Terre humaine » (1977-1984) et « Le grand remous » (1989-1991).
Mia Riddez décède le 13 octobre 1995, léguant ainsi un héritage où la place des femmes dans la culture a pris une importance capitale. Le parcours et les réalisations de Mia Riddez ont encouragé bien des femmes, dont sa petite-fille, Dominique Drouin, à œuvrer dans le domaine culturel. Assistant sa grand-mère dans des projets au cours des années 1970-1980, cette dernière est aujourd’hui auteure de romans, tels que la série « De mères en filles », et participe à la scénarisation de téléromans tels de « l’Échappée ».
Publication le 11 août 2022.

Références :
- S.N. « Riddez, Mia ». Artus : répertoire des artistes du Québec. (URL : https://artus.ca/riddez-mia/).
Madeleine Arbour (1923-2024)
Rédaction :
Au cours des derniers jours, est décédée une artiste pluridisciplinaire qui aura marqué l’histoire de l’art au 20e siècle, et plusieurs générations d’admirateurs. Née à Granby en 1923, Madeleine Arbour avait fêté son centième anniversaire l’an dernier. Elle est peintre, décoratrice d’intérieur, dessinatrice, designer, artiste des arts visuels et des arts de la scène, et animatrice de plusieurs émissions de télévision.
Madeleine a dû quitter l’école tôt pour aider sa mère à subvenir aux besoins de sa famille. Elle déménage à Montréal et commence sa carrière artistique par hasard, à l’âge de 16 ans, quand elle décore les vitrines de la célèbre bijouterie Birks, où elle est vendeuse. Pendant 8 ans, elle sera ainsi étalagiste pour la célèbre compagnie, et son travail attire l’attention des passants.
Quelques années plus tard, au début des années 1940, elle rencontre le peintre Paul-Émile Borduas, et devient rapidement militante du mouvement automatiste fondé par ce dernier. Leurs membres rejettent l’académisme et pensent que l’art doit être libre des limites fixées par les règles de la discipline artistique. En compagnie d’autres militants et militantes, dont son conjoint Pierre Gauvreau, Madeleine cosigne le manifeste du Refus global en 1948, pour dénoncer l’Église catholique et l’état québécois de l’époque, qui imposaient leurs valeurs traditionnelles et empêchaient les artistes de s’exprimer librement par leur art. Madeleine Arbour et la danseuse, peintre et sculptrice Françoise Sullivan étaient les dernières signataires encore vivantes du Refus global, après plus de 76 ans.
Après les années 1950, Madeleine poursuit sa carrière en accomplissant de nombreuses réalisations. Au petit écran, elle animera l’émission La boîte à surprise, pendant plusieurs années à la fin 1950 et au début des années 1960; elle y tient une chronique de bricolage avec des enfants. Plus tard au cours des années 1970, à l’émission Femme d’aujourd’hui, elle tient une autre chronique de décoration et de design.
Dans le domaine du design et de la décoration intérieure, Madeleine fera le design des voitures des trains de Via Rail, ainsi que des salons Panorama des gares de Montréal, Ottawa et Toronto. Elle réaménage les avions Airbus et Boeing d’Air Canada. Elle réalise le design de l’atelier de peinture de son ami Jean-Paul Riopelle, puis le design de la salle Saint-Laurent à la Citadelle de Québec, ainsi que celui des sections publiques à Rideau Hall, la résidence du gouverneur général du Canada.
Madeleine a également enseigné de 1962 à 1982, à l’Institut des arts appliqués de Montréal, puis au Cégep du Vieux Montréal. Elle devient la première femme présidente du Conseil des arts du Montréal métropolitain. On lui décerne de nombreuses distinctions honorifiques. Elle devient notamment membre de l’Ordre du Canada en 1986, et chevalière de l’Ordre national du Québec en 1999.

Publication le 12 décembre 2024.

Références:
- « Madeleine Arbour », dans Wikipédia. <https://fr.wikipedia.org/wiki/Madeleine_Arbour> (Consulté le 11 décembre 2024).
- « Madeleine Arbour (1923 – 2024) », dans le site web de l’Ordre national du Québec. < https://www.ordre-national.gouv.qc.ca/membres/membre.asp…> (Consulté le 11 décembre 2024).
- « ARBOUR, Madeleine », dans ARTUS : Répertoire des artistes du Québec. < https://artus.ca/arbour-madeleine/> (Consulté le 11 décembre 2024).
- Pour admirer quelques-unes de ses oeuvres: « Arbour, Madeleine », dans Collections | MNBAQ. < https://collections.mnbaq.org/fr/artiste/600003087> (Consulté le 11 décembre 2024).
Kim Yaroshevskaya (1923-2025)
Rédaction :
Née le 1er octobre 1923, cette grande dame de la culture québécoise quitte sa Russie natale à l’âge de 10 ans pour venir vivre à Montréal chez une tante.
Parmi ses personnages mythiques, notons Fanfreluche, qu’elle a imaginé et créé de toute pièce, des scénarios aux costumes. Diffusé à Radio-Canada, durant La boîte à surprise à partir de 1956, Fanfreluche raconte ses histoires jusqu’en 1971.
Entre 1977 et 1987, c’est son personnage de Grand-mère dans Passe-Partout, qui conquit une nouvelle génération d’enfants, à travers ses histoires.
Depuis près de 70 ans, Kim Yaroshevskaya joue, créé, écrit et raconte pour le plaisir des petits et des grands.
Publication le 1er octobre 2023.

Huguette Bouchard-Bonet (1933-2019)
Rédaction : Louise Langevin, Société d’histoire et de généalogie de Belœil‒Mont-Saint-Hilaire
Née en 1933 à Ahuntsic d’un père inspecteur laitier et d’une mère au foyer, Huguette Bouchard est l’aînée de trois filles. Toute jeune, elle est timide et réservée, réfugiée dans son monde intérieur qui l’inspirera toute sa vie. À 19 ans, elle s’initie à la sculpture et à la céramique à l’École des Beaux-Arts de Montréal où elle rencontre Jordi Bonet qu’elle épousera en 1956 dans « une union du cœur et de l’âme » écrit-elle. De cette union naîtront Laurent, Stéphane et Sonia.
Au Québec, à la fin de 1958, les débuts sont difficiles : Huguette aide son mari et s’occupe des enfants. « Ma mère acceptait de vivre au second plan derrière Jordi, pour qui son art passait avant tout. C’était une femme exceptionnelle ! » affirme Sonia. En 1969, les succès de Jordi permettent d’acheter, à Mont-Saint-Hilaire, le manoir Rouville-Campbell où la famille va demeurer jusqu’en 1986.
Huguette Bouchard-Bonet crée ses sculptures, enseigne, donne des conférences au Musée des Beaux-Arts de Montréal, à Trois-Rivières et à Québec, préside la galerie Jordi-Bonet et expose localement et internationalement (Californie, Japon, etc.). Dans « Destinée » (2012), elle écrit que, même après 25 ans avec Jordi Bonet, elle « conserve ses couloirs d’inspiration propres ». Son univers est « empreint d’onirisme et de beauté » (R. Bernier). Ses œuvres tiennent d’un symbolisme dont la femme et l’amour sont les inspirations dans une synthèse de la Nature et de l’Humain. Elle a innové dans sa manière de travailler la terre, les cuissons, les glaçures et les couleurs que les gens du métier admirent encore (P.H. Savignac).
Malgré la perte de Stéphane en 1971 et de Jordi en 1979, elle reste proche de ses enfants et persiste dans son art. À 80 ans, la maladie l’oblige à arrêter la sculpture. Femme amoureuse et mère aimante, cette artiste inspirée laisse une œuvre remarquable de beauté. Elle décède à Mont-Saint-Hilaire à l’âge de 86 ans.
Publication le 8 août 2024.

Références :
- Robert Bernier, « Dossier : femmes créatives », Revue Le Parcours, no 88, avril-mai 2016, p. 27.
- Huguette Bouchard-Bonet, « Destinée, texte de Huguette Bouchard-Bonet, épouse de l’artiste », Parcours, décembre 2012, mis en ligne le 26 décembre 2019 [https://revue-parcours.com/destinee/].
- Pierre H. Savignac. « Une grande famille d’artistes, les Bonet », Le collectionneur, automne 1990, (non paginé), en ligne
- Entretien avec Sonia Bonet à Mont-Saint-Hilaire, 18 juin 2024.
Joséphine Bacon (1947- )
Rédaction :
Surtout connue en tant que poète et réalisatrice innue, Joséphine Bacon est également traductrice, conférencière et enseignante d’innu-aimun. Elle a collaboré à plusieurs documentaires, courts métrages et séries télévisées. Notamment, elle a réalisé les films Ameshkuatan – Les sorties du castor (1978) et Tshishe Mishtikuashisht – Le petit grand européen : Johan Beetz (1997).
Ce n’est qu’en 2008 que le public découvre ses talents de poète dans l’œuvre collective Aimititau ! Parlons-nous ! Un an plus tard, elle publie son premier recueil bilingue Tshissinuatshitakana / Bâtons à message. Elle traduit ses poèmes en innu-aimun pour que les ainé·e·s puissent lire sa poésie, mais aussi pour conserver la richesse des mots de sa langue maternelle. En 2013, elle fait paraitre Nipishapui nete mushuat / Un thé dans la toundra et en 2018, Uiesh / Quelque part en plus d’avoir contribué à plusieurs ouvrages collectifs. Par son art, elle inspire toute une génération d’artistes!
Son travail pour la préservation de la langue et de la culture innue a été reconnu par l’Université Laval qui lui a accordé un doctorat honoris causa. Elle a également reçu plusieurs prix littéraires.
Publication le 4 août 2022.
Pour découvrir une partie de l’univers de Joséphine Bacon, consultez le documentaire Je m’appelle humain de Kim O’Bomsawin. https://ici.tou.tv/je-m-appelle-humain