Françoise Loranger (1913-1995) : sous le signe du lion
Rédaction : Louise Langevin,
Société d’histoire et de généalogie de Belœil—Mont-Saint-Hilaire
L’œuvre de cette femme passionnée a marqué bien des générations. On se souvient de la série « Sous le signe du lion » diffusée à Radio-Canada en 1961 et en 1997. Les thèmes chers à Loranger s’y trouvent : la famille bourgeoise avec ses secrets, les classes sociales, l’adultère et l’euthanasie, le nationalisme, le catholicisme omniprésent. Si la série a bousculé des bien-pensants à l’époque, elle en a ravi plusieurs et demeure célèbre.
Françoise Loranger naît en 1913 à Saint-Hilaire dans une famille de la grande bourgeoisie qui lui lègue une soif pour la culture et la liberté d’esprit qui imprégnera tous ses écrits. Diplômée en lettres et en sciences, à 17 ans, elle publie des nouvelles dans des revues aussi diverses que la « Revue populaire », le « Bulletin des agriculteurs » ou le « Quartier latin ». Son style élégant et précis attire l’intérêt des lecteurs. Vers 1939, elle écrit des scénario pour la radio. « Mathieu » (1949) devient un roman classique où elle explore la quête de soi et le désir de dépasser sa condition hors de l’Église.
Dès 1960, ses pièces sont jouées sur scène et au petit écran, la confirmant grande dramaturge de la famille et des questions féministes et politiques : Une maison, un jour (1965), Encore cinq minutes (1967, Prix du Gouverneur général en 1968), Double jeu (1969), Jour après jour, Un si bel automne (1971). S’éloignant du théâtre traditionnel, elle écrit Le chemin du Roy (1967) et Médium saignant (1970).
Mariée deux fois, mère de deux filles, elle vit ses vingt dernières années loin de l’effervescence littéraire, à Saint-Marc en bordure du Richelieu, jusqu’à son décès en 1995, à presque 82 ans. Des rues, une bibliothèque, un cercle littéraire ont adopté son nom, soulignant ainsi son importance dans la littérature québécoise.
Publication le 17 octobre 2024.
Références :
« Françoise Loranger », [En ligne], Wikipédia, 6 avril 2023, 12 h 03, [https://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7oise_Loranger] (Consulté le 4 octobre 2024)
« Archives | Françoise Loranger, romancière et dramaturge résolument moderne, s’éteignait il y a 25 ans », [En ligne], Radio-Canada, 7 avril 2020, 13 h 16, (Consulté le 4 octobre 2024)
Bibliothèque et Archives nationales du Québec, Notice du Fonds Françoise Loranger 1947-1993, Advitam, [https://advitam.banq.qc.ca/notice/526197], (Consulté le 4 octobre 2024)
Leonard E. Doucette, « Loranger, Françoise », [En ligne], L’Encyclopédie canadienne, 2013, [https://www.thecanadianencyclopedia.ca/…/loranger…]
Jean-Pierre Crête, Françoise Loranger : la recherche d’une identité, Montréal, Léméac, 1974, 148 p. (collection Documents)
Denise Daigle et Marthe Goulet, Cahier généalogique. De Pierre Rivard à Françoise Loranger, Cercle littéraire Françoise Loranger, 2013, 48 p
Éva Bouchard (1885-1949)
Texte : Musée Louis-Hémon, revisité par Samuel Dupras
Lorsque le roman Maria Chapdelaine paraît au milieu des années 1910, seulement quelques amateurs de littérature s’enthousiasment pour ce roman agriculturiste. Parmi eux, le journaliste Damase Potvin décide de mener une enquête pour retrouver les personnes qui auraient inspiré l’auteur français Louis Hémon lors de son passage à Péribonka en 1912.
Dans un article du Terroir paru en 1918, il déclare alors que Maria Chapdelaine est en réalité Éva Bouchard, sœur de Laura Bouchard chez qui l’écrivain a logé alors qu’il était à l’emploi de la famille.
Née à Saint-Prime, en février 1885, Éva Bouchard est pourtant l’antithèse de l’héroïne de Hémon. Instruite par les Ursulines de Roberval, elle intègre brièvement les Sœurs blanches d’Afrique et enseigne à Saint-Amédée de Péribonka ainsi qu’au Lac-Bouchette.
Comme la plupart des gens de Péribonka de l’époque, Éva Bouchard n’a qu’une piètre opinion de Louis Hémon. Il faut dire que le roman Maria Chapdelaine a été assez mal accueilli au Lac-Saint-Jean où on a l’impression que l’écrivain français a violé l’intimité des gens du village en les exposant dans les pages de son récit. Toutefois, depuis le succès international que connaît le roman après sa réédition par l’éditeur français Grasset en 1921, de nombreux visiteurs affluent sur les lieux où se déroule le récit et cherchent à rencontrer celle qui aurait inspiré Hémon.
D’abord insultée d’avoir été associée à Maria Chapdelaine, Éva Bouchard se prête peu à peu au jeu et finit par endosser le rôle qu’on cherchait à lui attribuer. À compter de 1928, elle prononce des conférences et participe à de nombreux événements littéraires et patriotiques au Québec, en Ontario, aux États-Unis et en France. Dix ans plus tard, lorsqu’on ouvre les portes du Musée Maria-Chapdelaine à Péribonka, au sein même de la maison où Louis Hémon a été hébergé, elle en devient naturellement la gardienne. Elle y reçoit les touristes venus des quatre coins du monde et entretient une importante correspondance sous l’identité de Maria Chapdelaine. En plus d’avoir contribué à la renommée internationale du roman, elle aura su s’assurer de la pérennité de ce que deviendra le Musée Louis-Hémon.
Éva Bouchard est décédée le 23 décembre 1949. Elle repose dans le cimetière de Péribonka, sous l’épitaphe « Éva Bouchard (Maria Chapdelaine) ».
Publication le 8 octobre 2024.
Goutte de lait 1910-1970
Rédaction : _
Au début du XX è siècle, 1 enfant sur 4 mourait avant l’âge de 1 an, Montréal connaissait le plus haut taux de mortalité infantile.
Ce n’est qu’à partir de 1910 à Montréal et en 1915 à Québec que les cliniques de la Goutte de lait s’établissent.
Frances Mathilde Barnard est la fondatrice de l’Association de la goutte de lait (1915-1932), service de cliniques de consultation pour nourrissons, d’éducation des mères et de distribution de lait de bonne qualité aux familles pauvres.
Frances Mathilde Barnard est née le 29 mai 1859 à Albany, N.Y. et décède le 3 mars 1938 à Québec. Elle est l’ainée d’une famille de dix enfants où se côtoient les cultures anglophone et francophone. Par son mariage avec le juge Jules Tessier le 27 juin 1882 elle devient québécoise. Elle s’investit alors totalement dans la communauté québécoise de Québec.
Outre son engagement dans le domaine culturel, elle institue en avril 1915 les Gouttes de lait. Sa présidence est marquée par l’ouverture d’une douzaine de cliniques principalement dans les quartiers pauvres de la capitale.
En 1919 elle encourage la création de l’Assistance maternelle de Québec, œuvre qui fournit une aide médicale et matérielle aux femmes enceintes pauvres qui existait déjà depuis 1911 à Montréal.
À Montréal, en 1901, La Patrie ouvre la première Goutte de lait. Une campagne de souscription est lancée mais ce projet ne dure pas. Par la suite, d’autres cliniques s’ouvriront à partir de 1911 dont celle affiliée à l’hôpital Ste-Justine du Dr Irma Levasseur en 1912.
Toutes ces cliniques sont l’œuvre de dames patronnesses, d’infirmières dévouées. Les présidentes se succèdent jusqu’en 1970 où l’œuvre de l’Association québécoise de la Goutte de lait perd son autorité en matière de santé préventive. Le gouvernement du Québec centralisant le domaine de la santé, la sécurité sociale et de la protection maternelle et infantile.
Publication le 21 septembre 2024.
Références :
Cap-aux-diamants, numéro 28, hiver 1992
Denyse Baillargeon, Barnard, Frances Mathilde (Tessier), dictionnaire biographique du Canada, vol 16
Séverin Lachapelle, L’œuvre des Gouttes de lait à Montréal, rapport, 1910
Madeleine Gleason-Huguenin, Portraits de femmes, édition La Patrie, août 1938, p 256
L’Opération para-pluie (1965)
Texte : _
Dans les années 1950, plusieurs entreprises expérimentent la fabrication de pluie artificielle afin de protéger les forêts contre les incendies et d’augmenter le débit dans les centrales hydroélectriques. À partir des années 1960, la population se pose des questions sur cette pratique, qui est loin d’être efficace et qui risque d’augmenter les quantités de pluie dans les régions ciblées.
En 1964, la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean connait un été particulièrement pluvieux et, rapidement, l’opinion populaire met la faute sur les machines à pluie. Après de vives critiques, les agriculteurs de la région obtiennent du gouvernement provincial l’interdiction de la fabrication de pluie artificielle aux dates correspondant aux semences, aux récoltes du foin et aux récoltes des grains.
Un groupe de femmes d’Alma, qui se regroupe sous le nom «Le mouvement du beau temps», va quant à lui demander l’interdiction complète et immédiate de cette pratique. Le groupe est composé de Janine Simard, Raymonde Falardeau, Georgette Georgiev, Thérère Krieber, Charlotte Baribeau, Charlotte Côté et Line Tremblay.
Elles jugent que René Lévesque, le ministre des Richesses naturelles, ne se préoccupe que des arguments économiques. Elles veulent faire valoir le point de vue de la santé physique et psychologique, et surtout, celle de leurs enfants. Elles font valoir des avis de scientifiques et de professionnels de la santé sur l’importance d’un été ensoleillé sur la santé. Elles citent des pédiatres qui parlent de l’effet du manque de soleil chez les enfants (maladies des voies respiratoires, rachitisme, maladies de la peau) et de son effet sur la santé mentale. Elles mentionnent aussi qu’aucune recherche scientifique n’a prouvé la non-toxicité de l’iodure d’argent (dont la vapeur est envoyée vers les nuages pour y déloger les cristaux de glace).
Le groupe de mères de famille lance l’Opération para-pluie. Elles font signer une pétition aux femmes de la région et récoltent les noms de 60 718 dames du Saguenay–Lac-Saint-Jean. Elles obtiennent aussi des appuis de groupes médicaux, de conseils municipaux et d’une foule d’associations et de regroupements.
En mai 1965, elles rencontrent le ministre des Richesses naturelles, René Lévesque, pour leur présenter leur pétition et leurs demandes. Devant la pression populaire, le ministre finira par demander aux compagnies de ne pas reprendre les opérations de fabrication de pluie artificielle pour l’été 1965, ce qui mettra fin à la mobilisation. En 1970, le gouvernement va adopter la Loi sur la provocation artificielle de la pluie pour encadrer cette pratique.
Publication le 5 septembre2024.
Le groupe de femme se prépare pour sa rencontre avec le ministre Lévesque, le 11 mai 1965. Société d’histoire du Lac-Saint-Jean, F91
Sources :
Claude Bérubé, L’incroyable histoire des machines à pluie, 2007, Les productions de la Chasse Galerie et l’Office national du film du Canada.
Société d’histoire du Lac-Saint-Jean, «Ensemencement des nuages», Dossier F1000,S3,SS4,D3
Société d’histoire du Lac-Saint-Jean, «UCC du Saguenay», Fonds F293,D5
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